19.07.2021 Christine Lavarde est interviewée aujourd’hui dans le Figaro. La Sénatrice LR des Hauts-de-Seine insiste sur le poids des impôts de production, très nuisibles à la compétitivité française.
Retrouvez son entretien :
LE FIGARO. – La France reste championne européenne en matière de pression fiscale et sociale en dépit de la baisse des prélèvements obligatoires de 50 milliards d’euros entre 2018 et 2023. Ce n’est donc pas suffisant?
Christine LAVARDE. – La France part de très loin en matière de prélèvements obligatoires. Pour les ménages, la fiscalité a effectivement un peu baissé. Mais il ne faut pas oublier qu’au 1er janvier 2018, la CSG, payée par les salariés et les retraités, a augmenté de 1,7 point. Par ailleurs, cette baisse a été principalement réalisée avec la suppression de la taxe d’habitation qui était entre les mains des élus locaux.
Cette décision a été une erreur: une partie des habitants a perdu tout lien avec les services publics locaux dont ils bénéficient. Du côté des entreprises, la baisse des impôts de production de 10 milliards par an décidée par le gouvernement est certes une avancée, mais ce n’est pas suffisant pour améliorer la compétitivité du pays.
C’est-à-dire?
La crise sanitaire a montré notre extrême dépendance à certaines productions délocalisées à l’étranger. Je pense, par exemple, aux semi-conducteurs ou aux médicaments. La relocalisation des chaînes de production est un enjeu majeur pour construire une économie résiliente. Cela pose la question des coûts de production qui sont hors norme dans notre pays. C’est un boulet que se traîne la France depuis des années. Je ne suis pas gênée par le fait qu’une entreprise paie un impôt lorsqu’elle réalise des profits. En revanche, il faut diminuer les charges qui pèsent avant même la création d’un chiffre d’affaires, comme les impôts de production ou le coût du travail.
Faut-il donc s’attaquer aux cotisations qui restent extrêmement élevées?
Il est nécessaire de diminuer les charges qui pèsent sur la production. Les charges sociales servent au financement d’organismes sociaux très endettés. Nous devons engager un véritable travail sur la prévention médicale, les traitements curatifs ont un coût financier beaucoup plus élevé. Concernant les retraites, je suis favorable à un report de l’âge d’ouverture des droits. La réforme paramétrique peut être mise en œuvre rapidement. On peut aussi rendre ces charges acceptables pour les employeurs, en allant beaucoup plus loin dans la suppression des impôts de production. Une telle décision nécessitera toutefois d’être accompagnée d’une vraie réforme du financement des collectivités locales pour ne pas les rendre dépendantes des transferts financiers de l’État.
Craignez-vous que le débat sur la «taxation des riches» pollue la campagne présidentielle?
Ce débat a déjà lieu et ce n’est évidemment pas la bonne solution. Les foyers très aisés sont les plus mobiles. Il faut les inciter à rester en France et qu’ils contribuent ainsi à la croissance. Bon nombre de ces personnes prennent des risques, investissent et contribuent au développement économique du pays. L’investissement dans la pierre, qui est jugé peu productif, continue d’être imposé. C’est une erreur majeure car le marché du logement joue un rôle clé dans l’économie.
Faut-il réformer l’impôt sur le revenu acquitté par de moins en moins de contribuables?
Il y a effectivement une tranche de la population qui n’est pas considérée comme «riche et mobile», qui travaille, qui contribue largement à l’impôt sur le revenu, qui ne bénéficie d’aucune aide publique car trop «riche» et qui se sent déclassée. Nous avons là aussi un travail à mener pour qu’il y ait un intérêt réel à travailler en jouant sur différents leviers.
Venons-en à l’assainissement des finances publiques plombées par la crise. Doit-on engager des économies dès maintenant?
La stratégie du gouvernement est de stabiliser la dette publique avec un rythme de progression des dépenses inférieur à la croissance du PIB. C’est une condition nécessaire mais ce n’est pas une condition suffisante. La France présente un déficit primaire. Il faut arrêter cette fuite en avant en s’attaquant aux économies et en améliorant la qualité de la dépense. Aujourd’hui, on demande tout à l’État. Le pays est suradministré, on l’a bien vu durant la crise.